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L'explorateur Rémi Camus à la découverte des secrets du Rhône

Lundi 15 Septembre - 19:00

Interview


Rémi Camus part à la découverte des secrets du Rhône - © Instagram remi_camus_explorer
Explorateur, formateur en techniques de survie et membre de la Société des explorateurs français, Rémi Camus s'est lancé lundi 15 septembre dans une nouvelle aventure scientifique et humaine : descendre le Rhône en packraft, du glacier suisse jusqu'à la Méditerranée, pour cartographier les polluants éternels. Nous l'avons rencontré avant son départ.


Radio SCOOP : Rémi, pouvez-vous nous présenter votre projet ?

Rémi Camus : "Je m'appelle Rémi Camus, je suis explorateur, formateur en techniques de survie et membre de la Société des explorateurs français. Mon nouveau projet consiste à descendre le Rhône en packraft, depuis le glacier dans le canton du Valais en Suisse jusqu'à la mer Méditerranée. Cela représente 812 kilomètres d'expédition.

Le but est de réaliser une cartographie la plus complète possible des polluants éternels, les PFAS (ou “pifas”), ces substances chimiques invisibles à l'œil nu, mais omniprésentes dans notre environnement.


Comment est né ce projet ?


"Ce projet est né à la suite de ma dernière expédition : en juin 2023, j'ai traversé la Méditerranée à la nage, entre Calvi et Monaco, en totale autonomie. À cette occasion, j'avais déjà collaboré avec le laboratoire Wessling, basé à Saint-Quentin-Fallavier, dans l'est lyonnais, pour étudier les PFAS.

Les résultats obtenus nous ont interpellés. On s'est demandé ce qu'on pouvait faire de plus pour sensibiliser et alerter sur cette pollution invisible. C'est ainsi qu'est née l'idée de cartographier le Rhône, un fleuve emblématique, de sa source à son embouchure."

Des prélèvements d'eau en surface et en profondeur


Comment se déroule concrètement l'expédition ?


"L'aventure va durer exactement un mois. Pendant 30 jours, nous allons effectuer plus de 90 prélèvements d'eau à différentes profondeurs : sous 30 cm et jusqu'à 2 mètres. Nous allons étudier plus de 50 molécules de PFAS. La liste initiale de 20 molécules a été étendue à 28, puis à plus de 56 grâce au travail du laboratoire Wessling avec ses nombreux partenaires.


L'expédition se fait en deux parties. La première, sur le glacier du Rhône, a été réalisée il y a quelques jours. Pour des raisons de sécurité, nous étions sept personnes. Il fallait attendre des conditions climatiques optimales pour marcher sur le glacier et effectuer les premiers prélèvements.


La seconde partie commence maintenant. Nous partons dans quelques heures pour Gletsch, un petit village au pied du glacier. Demain matin (ce lundi, ndlr), nous serons dans l'eau pour entamer les 812 km jusqu'à la Méditerranée."


Combien de temps vous a-t-il fallu pour préparer cette aventure ?


"Cela nous a pris plusieurs mois. Il y a d'abord eu la phase de planification : définir les objectifs, créer un dossier de présentation, établir les protocoles de prélèvement, identifier les lieux précis, etc.


Ensuite, il a fallu trouver des financements. C'est le nerf de la guerre pour beaucoup de projets. Il faut convaincre des partenaires, les embarquer dans une aventure humaine, même si elle est aussi scientifique.


Nous avons également dû identifier les bons laboratoires pour interpréter les résultats. Les données brutes ne suffisent pas : il faut une vraie interprétation pour que le public comprenne les enjeux."

Avez-vous rencontré des experts pour affiner votre approche ?


"Oui, notamment au canton du Valais, où j'ai eu la chance de rencontrer des hydrologues et glaciologues du Créalp. Ils m'ont expliqué que la saison de l'expédition influence fortement les résultats.


Par exemple, en avril, avant la fonte des glaces, il y a potentiellement moins d'eau dans le Rhône, donc une concentration plus élevée de PFAS. En septembre, avec la fonte active, le fleuve est plus dilué, ce qui peut donner l'impression d'une moindre pollution. Ces paramètres sont essentiels à prendre en compte."

Une aventure à suivre sur les réseaux et sur Radio SCOOP


Comment comptez-vous partager cette aventure avec le public ?


"La communication est un volet essentiel. Nous avons mis en place une stratégie de relations presse et nous développons un documentaire de 52 minutes. L'objectif est de montrer la beauté du Rhône, sa fragilité, et de sensibiliser à la pollution invisible.


Ce fleuve est magique. Il prend sa source dans un glacier encore existant – mais pour combien de temps ? – et traverse des régions qui permettent à des millions de personnes de vivre. Pour le protéger, il faut d'abord en prendre conscience."

Quel moyen de transport avez-vous choisi pour cette expédition ?

"Nous utilisons un packraft, c'est-à-dire un canoë gonflable ultra-léger. Son principal avantage, c'est sa portabilité. Lorsqu'on rencontre des barrages hydroélectriques ou des passages dangereux, on peut facilement le dégonfler, le mettre dans un sac à dos et franchir les obstacles à pied.
 

C'est aussi un choix cohérent avec la réglementation. Le Rhône est un fleuve contrôlé : dans le Valais, sur le Léman, et en France via la CNR. Si j'avais voulu faire cette descente à la nage, cela aurait nécessité beaucoup plus d'autorisations. Avec une embarcation, on reste hors de l'eau, ce qui simplifie les démarches.
 

Et puis, il faut transporter tout le matériel scientifique. On réalise entre 2 et 4 prélèvements par jour, donc le packraft est indispensable pour acheminer les équipements."
 

Quand les résultats seront-ils disponibles ?


"Les analyses vont assez vite, mais l'interprétation demande du temps. On espère avoir terminé les analyses d'ici novembre, et commencer l'interprétation début 2026.
 

L'objectif est de produire une cartographie précise, avec des données expliquées en fonction des affluents, des zones de turbulence, de l'activité industrielle ou agricole. Il ne s'agit pas juste de chiffres bruts : il faut raconter ce que ces chiffres signifient."
 

Que comptez-vous faire une fois les résultats obtenus ?


"Nous voulons alerter les pouvoirs publics : les maires, les métropoles, les agglomérations. Il faut les sensibiliser à la problématique des PFAS, mais aussi leur montrer que des solutions existent.
 

Ce projet ne vise pas à démoraliser. Au contraire, c'est une aventure humaine qui veut embarquer les gens et leur montrer qu'il y a de l'espoir. Certaines technologies pour capter les PFAS sont déjà en application, d'autres sont en phase de recherche et développement. Il faut les soutenir."
 

Quel est l'enjeu global derrière cette pollution invisible ?


"Il est colossal. Vos confrères du Monde, appuyés par une vingtaine de médias, ont estimé le coût de la dépollution en Europe sur les 20 prochaines années : entre 90 milliards et 2.000 milliards d'euros. C'est presque la dette de la France !
 

On est face à un défi environnemental et sociétal majeur. Les PFAS forment une famille de plus de 10 000 molécules, et il faut trouver des alternatives. Des solutions émergent, mais cela prend du temps."

De passage à Lyon autour du 27 septembre



Quel message souhaitez-vous transmettre au grand public ?


"Je veux que les gens deviennent "consom'acteurs". Aujourd'hui, on manque cruellement d'informations sur ce qu'on achète. Il faut plus de lois, plus de transparence, pour que chacun puisse faire des choix éclairés.
 

Et surtout, je veux que les gens vivent l'expérience. J'ai longtemps été frustré par mes expéditions lointaines, où je parlais d'écologie à l'autre bout du monde. Là, on est ancré sur le territoire, entre la Suisse et la vallée du Rhône. C'est concret.
 

Alors, je dis : venez nous rencontrer ! Venez faire des bivouacs avec nous, participer aux prélèvements, témoigner. Il n'y a rien de mieux que de voir les choses de ses propres yeux. On a de quoi équiper tout le monde, ne vous inquiétez pas. Venez vivre l'aventure !"

Rémi Camus sera de passage en bivouac à Lyon, en principe le 27 septembre. Son aventure fera l'objet d'un podcast Radio SCOOP Explore.